Le blog des éditions Libertalia

Christophe Naudin invité de l’émission Arrêt sur images

samedi 24 octobre 2020 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Extrait de l’émission Arrêt sur images du 23 octobre 2020, « Enseigner après Conflans : “Nous sommes des soldats de la pensée” »

« Cinq ans après les attentats de 2015, l’assassinat barbare de Samuel Paty, professeur d’histoire-géographie, est un nouveau choc qui ne laisse indemne aucun d’entre nous, et nous ramène face à nos convictions et nos croyances, individuellement et collectivement. Tous, mais peut-être, avant, tous les professeurs. C’est la raison pour laquelle nous avons réuni sur ce plateau trois professeurs. Wahida El-Mansour est une ancienne enseignante de lettres et d’histoire dans un lycée de banlieue parisienne, co-autrice des Territoires vivants de la République ; Alexis Potschke, professeur de français dans un collège de la banlieue nord de Paris, a publié en 2019 son témoignage de prof, Rappeler les enfants (Seuil). Christophe Naudin, professeur d’histoire-géographie dans un collège du Val-de-Marne, rescapé des attentats de novembre 2015, publie chez Libertalia Journal d’un rescapé du Bataclan. »

Charles Martel et la bataille de Poitiers sur Geo.fr

samedi 24 octobre 2020 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Publié sur Geo.fr le 13 octobre 2020.

Charles Martel et la bataille de Poitiers

Homme d’État et de guerre, la vie et les exploits de Charles Martel (688-741), et la bataille de Poitiers en particulier, sont devenus des éléments d’histoire quasi-mythiques, récupérés notamment par les identitaires d’extrême droite. Retour sur l’histoire de cet affrontement entre le monde franc et l’empire islamique.

C’est une date qui apparaît dans toutes les chronologies comme l’un des plus hauts faits d’armes du Moyen-Âge : en 732, la bataille de Poitiers oppose les troupes arabo-berbères d’Abd al-Rahmân aux Francs de Charles Martel, qui remporte la victoire. Depuis Samuel Huntington et son essai Le Choc des civilisations (1996), on a pu voir dans l’événement le symbole d’une lutte entre deux modèles civilisationnels. Mais qu’en est-il vraiment ?

Les prémices de la dynastie carolingienne

Héritier de la lignée pipinnide, Charles Martel est le fils du maire du palais Pépin de Herstal (le plus haut dignitaire des royaumes francs, après le roi), et de sa seconde femme, Alpaïde – la polygamie, alors, était encore légale. Non sans complications : à la mort de Pépin « le Gros » en décembre 714, deux héritiers potentiels s’affrontent pour sa succession. D’un côté, sa première épouse Plectrude entend assumer la régence pour préserver le trône pour son petit-fils Théodebald ; de l’autre, son fils Charles est défendu par les partisans d’Alpaïde. Le conflit de succession déclenche une guerre civile de quatre ans, qui ébranle la lignée pippinide. Mais Charles Martel l’emporte finalement en 718.
Les premières années de son « règne » (car Charles Martel, rappelons-le, n’est pas roi) sont consacrées à la pacification du royaume franc. Il écrase ses anciens adversaires de la guerre civile, puis repousse la frontière orientale du royaume, conquérant entre 720 et 738 l’équivalent de l’actuelle Autriche et du sud de l’Allemagne. Il s’empare également de la partie occidentale des Pays-Bas en 734 en vainquant les Frisons de Poppo Ier, qui sont christianisés dans la foulée.

La bataille de Poitiers, un événement historique très débattu

Mais c’est à la suite de la bataille de Poitiers en 732 que Charles Martel entre définitivement dans la légende. Ses troupes franques affrontent les forces arabo-berbères d’Abd al-Rahmân, l’émir de Cordoue. Un choc de titans, donc, entre deux grandes puissances militaires qui s’affrontent au sud du royaume franc. La bataille a été présentée comme une victoire des chrétiens sur les musulmans, qui voulaient envahir la Gaule. L’extrême droite identitaire française, notamment, a réinvesti depuis les années 2000 cet épisode, interprété comme l’arrêt victorieux d’une colonisation en masse de populations musulmanes, qui résonne avec le mythe actuel du « grand remplacement ».
Or la réalité historique a peu à voir avec cette interprétation, expliquait en 2018 l’historien William Blanc, coauteur avec Christophe Naudin des Historiens de garde et de Charles Martel et la bataille de Poitiers. De l’histoire au mythe identitaire sur France Culture. Tout d’abord, la date même et le lieu de l’évènement ne font pas consensus : des historiens anglo-saxons, notamment, appellent l’épisode « la bataille de Tours ». De même, les forces en présence et leurs objectifs militaires et géostratégiques sont toujours débattus. « Il y avait un troisième larron, dans l’affaire, explique ainsi William Blanc lors de cette conférence : Eudes, le duc d’Aquitaine. Pendant longtemps, il s’est opposé aux troupes islamiques, il les a vaincues une fois à Toulouse en 721, et il a essayé de s’allier avec eux. Il y a donc un troisième camp : tout le sud de la Gaule, qui joue une espèce de double jeu entre le rouleau compresseur franc au nord et l’empire islamique au sud. » En effet, Charles Martel a de grandes ambitions pour le sud de la Gaule, qu’il veut remettre dans l’orbite du royaume des Francs.

L’extension du royaume franc

Mais pour William Blanc et Christophe Naudin, il est nécessaire de sortir de cette vision binaire d’un choc des civilisations. La dimension religieuse existe, mais elle n’est que très secondaire. Du côté chrétien, le concept de croisade n’existe pas encore, pas plus que celui de jihad en armes du côté musulman. Surtout, les troupes d’Abd al-Rahmân ne semblaient pas vouloir conquérir la Gaule, ni même Poitiers, mais plutôt avoir l’intention de piller les richesses franques du sud. « Le grand perdant de l’affaire, affirme William Blanc, ce n’est même pas Abd al-Rahmân. C’est Eudes, le duc d’Aquitaine, qui perd une grande partie de son autonomie, car il est obligé de faire appel à Charles Martel. » L’opération se répète quelques années plus tard, cette fois avec les Provençaux, dans le sud de la Bourgogne. Ces chrétiens de Burgondie, région peu ou prou indépendante, s’allient avec les troupes de l’Empire islamique, ce qui donne un prétexte à Charles Martel pour intervenir en 737. « Encore une fois, analyse William Blanc, ceux qui vont perdre dans cette bataille, ce sont les Provençaux qui vont perdre leur autonomie. »
L’ambition de Charles Martel va perdurer sous le règne de son fils Pépin le Bref, qui deviendra roi des Francs. Elle sera reprise par le petit-fils de Charles, Charlemagne, qui non content d’avoir mis la main sur l’Aquitaine et sur la Provence, étendra les royaumes francs à l’ouest et deviendra le premier empereur d’Occident depuis la chute de Rome.

Marine Jeannin

Ines voulait aller danser sur Danses avec la plume

samedi 24 octobre 2020 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Publié sur le site Danses avec la plume.

Notre avis.
Gros coup de cœur pour l’histoire de la petite rate Ines, qui décide de ne pas se rendre au grand bal des cœurs-à-prendre. « Mais pourquoi ? », se lamente sa famille. Ines aime pourtant tellement danser. Ce qu’elle refuse, c’est de céder aux convenances sociales, à un monde très normatif où l’on doit forcément aller au bal pour y trouver un beau cavalier. « C’est ma vie après tout ! Je ne vais pas la passer à m’oublier pour faire plaisir aux autres ! » Tout à fait d’accord avec toi, Ines ! Ce qui est enthousiasmant dans cette histoire écrite par Manon Bouchareu, enseignante en école élémentaire auprès d’enfants sourds et porteurs de handicap, c’est l’attitude de la jeune héroïne. Si elle résiste, elle le fait en essayant de faire comprendre ses choix, sans rompre les liens avec les siens. Or tout le monde n’est peut-être pas prêt à accueillir cette parole. On peut donc être en désaccord avec celles et ceux qui prétendent vouloir notre bien, sans renoncer à leur montrer que d’autres chemins moins normés sont possibles.
Tranche d’âge : à partir de 6 ans

Journal d’un rescapé du bataclan dans Le Monde des livres

jeudi 22 octobre 2020 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Publié dans Le Monde des livres, daté du vendredi 23 octobre 2020.

Un prof face à Daech

Quelques jours après l’assassinat de Samuel Paty, un autre professeur d’histoire au collège signe « Journal d’un rescapé du Bataclan », témoignage bouleversant, d’une stupéfiante résonance.

Voici le journal d’un professeur d’histoire. À la date du 7 septembre 2017, il note : « Ma nouvelle salle de cours n’est pas idéale en cas d’attaque du collège. Je donne direct sur la cour, avec des vitres sans rideaux… » Un an plus tôt, à propos des exercices « attentat-intrusion » décidés par le ministère, il s’interroge : « On va demander aux élèves de faire des points de compression à leurs profs criblés de balles ? » Et le 5 décembre 2015, ayant lu dans le magazine francophone de l’organisation État islamique, Dar al-Islam, une dénonciation du complot judéo-maçonnique qui serait à l’origine de l’école républicaine, il ironise : « Après avoir visé des lieux festifs et de “perversion”, Daech voudrait à présent s’attaquer aux enseignants. Ce n’est pas une grande surprise […]. On attend avec impatience les formations proposées par l’Éducation nationale pour réagir à une attaque en salle des profs par des individus armés de fusils d’assaut et de ceintures d’explosifs. »

À peine un mois avant d’écrire ces mots, le 13 novembre, Christophe Naudin se trouvait au Bataclan. Il y est resté caché des heures dans un cagibi, serré contre d’autres corps affolés. Il y a perdu son ami Vincent. Il y a enjambé des cadavres. Et il y a croisé le regard d’un des tueurs, ce regard furieux, saturé de haine, qui a donné à sa propre existence un nouveau coup d’envoi. Le mince volume qu’il publie, le 30 octobre, sous le titre Journal d’un rescapé du Bataclan. Être historien et victime d’attentat, constitue un témoignage bouleversant. Non seulement parce qu’il trouve aujourd’hui, après l’assassinat de son collègue Samuel Paty, une stupéfiante résonance. Mais aussi parce qu’il retrace, avec une liberté et une sincérité admirables, les démêlés intérieurs d’un prof de gauche, activement engagé contre la haine des musulmans, soudain frappé par la terreur islamiste.

Une reconstruction et une élucidation

Ce journal est donc celui d’une reconstruction, au sens le plus charnel du terme : Christophe Naudin y consigne ses séances chez la psychologue, ses efforts pour surmonter le trauma, les flashs qui continuent de le hanter (souvenir obsédant de ce bout de cervelle collé à un ampli), les cauchemars qui hachent ses nuits (« L’image de types tirant à la kalach sur une école. J’ai vu les flammes sortir des canons et entendu les tirs… »), les crises de panique, le goût métallique qui lui reste dans la bouche… Mais cette reconstruction est également une élucidation : coauteur d’un essai consacré aux récupérations islamophobes du passé, Charles Martel et la bataille de Poitiers. De l’histoire au mythe identitaire (avec William Blanc, Libertalia, 2015), Christophe Naudin prend bientôt conscience que ses soutiens les plus enthousiastes manifestent trop souvent de l’indulgence à l’égard de l’islamisme. Lui qui a connu le réel des attentats djihadistes supporte de plus en plus mal que certains de ses amis minimisent le danger, voire le nient, quitte à cautionner des thèses qui n’ont rien à voir avec l’héritage de la gauche.
Un jour, au Salon anticolonial de Marseille, il est apostrophé par un homme qui proclame que les Berbères ont été « envoyés par les Juifs » pour se débarrasser des Arabes ; exaspéré par l’attitude accommodante des organisateurs, Naudin décide de s’en aller. Une autre fois, un collègue, avec lequel il surveille les examens du brevet, lui affirme qu’évidemment il condamne Daech… mais que la montée de l’islamisme en Algérie avait été organisée, à l’origine, par un certain « groupe » aux États-Unis. Ces épisodes, qui auraient naguère paru anecdotiques au militant de gauche, ont maintenant un effet dévastateur sur le rescapé du Bataclan : « Je sature de ceux qui font ami-ami avec Tariq Ramadan, le Parti des indigènes de la République et toute cette nébuleuse, parce que l’islam serait la religion des dominés […]. La leçon de Dieudonné n’a pas servi », déplore Naudin dans ce journal de survie et de colère.
Son livre parvient à se tenir sur la corde raide. Chaque phrase est traversée par une seule et même question : est-il possible de concilier révolte et lucidité, peut-on demeurer fidèle à une certaine espérance d’émancipation, tout en ouvrant les yeux sur les complaisances dont l’islamisme bénéficie à gauche ? Issu d’une famille de militants aux engagements sociaux et antiracistes, Naudin constate qu’il n’est pas le seul à s’interroger : « Je pense à des gens, particulièrement mes proches, qui n’en peuvent plus, à la fois de la violence et de l’ambiance insupportable dues aux attentats, et des leçons de morale, des procès en racisme ou des circonstances atténuantes (ou ressenties comme telles) accordées aux terroristes. »

Les ponts sont coupés

Bien sûr, son journal l’atteste, Christophe Naudin aimerait continuer à vivre et à parler en homme de gauche. Page après page, il brocarde les « fafs », se rend à Nuit debout, évoque avec nostalgie les grandes grèves de 1995, dit son indignation face au racisme ou aux violences policières. Pourtant, le Bataclan est passé par-là, et de la même manière que Philippe Lançon, dans Le Lambeau (Gallimard, 2018), décrit la cohabitation, dans un seul et même corps, entre « celui qui n’était pas tout à fait mort » et « celui qui allait devoir survivre », Naudin fait entendre une vérité qui est moins intellectuelle que physiologique : avec l’homme qu’il était « avant », les ponts sont désormais coupés.
La façon dont il évoque cette cassure, exhibant ses doutes, ses souffrances, relève du courage. En relève aussi le geste des éditions Libertalia, petite maison de sensibilité anarchiste, qui ose publier ce livre où sont mis en cause quelques-uns de ses « alliés », et même un auteur de son catalogue. Mais ces militants libertaires le savent bien : dans les périodes de funeste désorientation, quand triomphent la mauvaise foi et les grimaces partisanes, tout dissident prend le risque de se retrouver seul, sous le feu croisé des ennemis de toujours et des amis sans bravoure.
Que se passera-t-il, cette fois ? Par miracle, le témoignage de Christophe Naudin provoquera-t-il, chez ses camarades, un débat loyal ? Ou bien, comme si souvent dans le passé, le rescapé sera-t-il banni comme renégat ? Dans ce cas, le sceptique serait une fois encore traité en apostat, quand il faudrait reconnaître, chez celui qui prend la parole aujourd’hui, un homme de gauche giflé par la réalité, un historien mis en lambeaux.

Jean Birnbaum

Entretien avec Valérie Rey-Robert dans Questions de classe(s)

lundi 12 octobre 2020 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Paru le 5 octobre 2020 dans Questions de classe(s).

De la tenue républicaine à la culture du viol

À l’heure où les jeunes filles font encore l’objet de remarques et d’attaques concernant leur tenue vestimentaire, voire de sanctions au sein des établissements scolaires, loin de soutenir leur émancipation et de lutter contre les jugements sexistes qui véhiculent une culture du viol insidieuse, le ministre Blanquer n’a rien trouvé de mieux que de mettre en avant la « tenue républicaine » que chacun·e se devrait de respecter pour aller à l’école…
Questions de classe(s) a souhaité revenir sur cette culture du viol en questionnant Valérie Rey-Robert, qui a publié chez Libertalia Une culture du viol à la française (2019) et Le Sexisme, une affaire d’hommes (2020).

Q2C : Pouvez-vous expliquer rapidement ce que vous appelez la culture du viol ?
VRR : La culture du viol est l’ensemble des idées reçues sur les violeurs, les victimes de viol et les violences sexuelles. Invariablement ces idées reçues concourent à déresponsabiliser le violeur, culpabiliser la victime et invisibiliser le viol. On parle de « culture » car ces idées reçues se transmettent de génération en génération, évoluent avec le temps et imprègnent toute la société.

Q2C : Récemment, de nombreuses jeunes filles se sont vues reprocher, dans le cadre scolaire, de porter des vêtements « incorrects » parce que, semble-t-il, ils ne couvraient pas assez leur corps. La culture du viol peut-elle expliquer cette attitude d’autorités scolaires ?
VRR : On part du principe en demandant aux jeunes filles de davantage se couvrir qu’il y aurait une norme en la matière. Or cette norme semble difficile à définir puisqu’il y aurait le « trop peu couverte » (crop top, mini-jupe, short, etc.) et le « trop couverte » (foulard, hijab, jupe longue et ample, etc.). Cela fait déjà donc partie des injonctions contradictoires qu’on va envoyer aux jeunes filles en leur disant d’à la fois ne pas trop se couvrir et ne pas trop se découvrir.
Cela participe à la culture du viol parce que cela implique que, si elles sont trop découvertes, cela va affoler les garçons qui pourraient être déconcentrés voire agresser sexuellement. Encore une fois donc la responsabilité du mauvais comportement potentiel des garçons est mise sur le dos des filles qui doivent modifier leur comportement. Qui plus est cela assoit l’idée reçue que c’est la tenue dénudée qui ferait qu’un homme viole/insulte/agresse, maintes et maintes études ont démontré que cela n’est pas le cas.

Q2C : Cela relève-t-il selon vous d’une forme de violence institutionnelle, et si oui, quelle forme prend-elle ?
VRR : C’est bien évidemment une violence institutionnelle, systémique (dans le sens où elle fonde nos structures sociales) car, comme je le disais, on explique aux filles qu’il y a de mauvaises manières de s’habiller qui sortent de la simple convenance selon les lieux. Là où on dit à tout le monde de s’habiller convenablement (selon le métier auquel on postule, on ne va pas y aller en tongs et short, même chose pour un enterrement) mais seules les femmes se voient reprocher d’être trop ou pas assez habillées. Limiter la liberté de s’habiller (parce que sinon il va « leur arriver quelque chose et cela sera de leur faute ») est une violence genrée et sexiste.

Q2C : Comme ça se passe dans un cadre scolaire, peut-on parler d’un « geste pédagogique » ? Et si oui, que cherche-t-il, selon vous, à apprendre a) aux élèves filles, b) aux élèves garçons ?
VRR : Ce geste apprend aux filles et aux garçons que la responsabilité de ne pas être violée/agressée/insultée dépend des filles. Cela dit clairement aux garçons qu’ils n’ont pas à changer de comportement (et que quelque part ils ne le peuvent pas, tant les adultes valident qu’ils « perdent la tête » devant une paire de jambes ou un nombril) et cela apprend aux filles que c’est leur faute si elles sont harcelées/insultées/violées etc. parce qu’on les avait bien prévenues que cela tenait à leur tenue.

Q2C : Est-il pertinent d’établir un lien entre cette forme de répression et celle qui frappe les femmes portant le voile ?
VRR : Oui cela participe du même fonctionnement avec, comme je le disais au-dessus, l’idée perverse que les femmes devraient instinctivement savoir, par le « bon sens » ce qu’est une « tenue normale » comme a dit Blanquer. Les femmes sont censées en France être désirables par les hommes (ce que le voile empêcherait) mais sans pour autant l’être trop. Il faudrait donc apprendre à naviguer entre ces deux rives, sur une ligne extrêmement étroite. Bien sûr la répression des femmes portant le foulard est un peu différente puisqu’il s’y ajoute des critères racistes et une répression législative.

Propos recueillis par Mathieu Billière.