Le blog des éditions Libertalia

45 révolutions par minute, dans Le Maine libre

jeudi 12 novembre 2015 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Dans Le Maine libre, 8 octobre 2015.

Le groupe Nuclear Device sort un livre

Originaire de la Sarthe, le groupe a été une des fines fleurs du mouvement rock alternatif. Trente ans après, ses membres racontent leurs aventures dans un ouvrage qui vient de paraître.
Issu d’Allonnes, le groupe Nuclear Device a, entre 1982 et 1989, participé à la naissance et l’essor de ce que les médias appelleront « le rock alternatif ».
Aux côtés des Bérurier Noir et Ludwig von 88, il a parcouru la France, enchaînant les concerts, de squats en MJC. La formation laisse derrière elle plusieurs albums et de singuliers parcours de vie qu’elle a décidé de compiler dans un ouvrage de 160 pages intitulé 45 révolutions par minute, paru le 2 octobre chez Libertalia.
Le livre est la transcription de seize heures de discussions enregistrées par Daniel Paris-Clavel, rédacteur du fanzine Chéribibi. Pascal Carde, chanteur de Nuclear Device, revient sur ce projet : « Cela a pris cinq ans, le temps de retrouver les archives. Au début, la maison de disques Pias voulait faire une compilation, mais on avait plutôt un beau livret en tête. Le projet a donc fini entre les mains de la maison d’édition Libertalia. Même si on l’a fait dans l’esprit de l’époque, c’est à dire « Do It Yourself ».
Historique du groupe, photos de qualité ou encore anecdotes de tournée, l’ouvrage met en lumière les coulisses du mouvement. « C’est un témoignage, mais pas seulement le nôtre car notre producteur, nos copines de l’époque ou même nos parents, ont la parole. Il est certes destiné à ceux qui ont vécu ces événements mais aussi aux jeunes musiciens d’aujourd’hui. »
À noter que le livre s’accompagne d’une compilation 20 titres contenant des inédits, des lives et deux démos.

45 révolutions par minute

jeudi 12 novembre 2015 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Une belle recension (en ligne) de 45 révolutions par minute, 7 novembre 2015, par François Guibert —http://lachanteusemariefrance.fr.gd ; http://alainchenneviere.fr.gd ; http://heartbreakhotelthehellboysnikolaacin.fr.gd )

Nuclear Device – appelé aussi ND – fait partie des premiers groupes français [1] des années 1980 à avoir mélangé rock, reggae, dub, énergie punk. Mâtinés de phrases (parfois couplets ou refrains entiers) en espagnol lycéen de cuisine, les textes sont intelligents, « concernés » et en français.
Le tout avec une flashante identité visuelle, vocale et musicale. Celle-ci est à la fois inspirée de The Clash et totalement personnelle. Dans ses chansons comme dans son imagerie, ND a un sens aigu, accrocheur et percutant de l’esthétisme révolutionnaire.
Pourtant, de 1990 à 2015, les ND demeurent un groupe mal connu, souvent mis de côté, ignoré même, dans le rock d’ici. Que ce soit dans les interviews de la nouvelle génération (qui semble n’avoir jamais entendu parler de ND) ou dans les livres « d’histoire » de la musique électrique rebelle.
Le livre Nuclear Device 1982/1982 : 45 révolutions par minute – Histoire d’un groupe rock alternatif remet à l’honneur le parcours de ce groupe.
De manière concrète et captivante, il retrace le vécu de Pascal Carde (chant), son frère Patrick Carde (guitares de 1982 à 1988), Chema (guitares 1988/1989), Chris Maresco (batterie), Charlu (basse), Jean-Marc Odiot (sax). L’épopée de jeunes gars rockers, musiciens sur le tas et à l’arrache, originaires du Mans.
Si on aime le rock de voisinage (= français), aucun doute, c’est clairement « le » livre rock paru en 2015. Rien à voir avec les hagiographies de mastodontes (vivants ou morts) pop rock internationaux.
Déjà, superbe maquette, conçue par Patrick Carde, dans l’esprit revendicatif et rebelle de son groupe. Les photos sont positivement terribles, de vrais looks de rockers charismatiques. De multiples tracts et affiches, ainsi que les pochettes de disques, sont reproduits.
L’auteur, Daniel Paris-Clavel (rédacteur-concepteur du fanzine ChériBibi), ne fait pas partie de ND. Ce titi banlieusard du Val-de-Marne a découvert ND au moment où le groupe se séparait, donc en 1989. Hors de question pour lui de s’approprier une histoire qu’il n’a pas vécue lui-même en direct.
Aussi a-t-il recoupé et classé par ordre chronologique les phrases prononcées par tous les interviewés. Des années 1970 à aujourd’hui, de l’enfance des frères Carde et leurs copains à leurs métiers respectifs en 2015.
Daniel Paris-Clavel a effectué un fastidieux travail de retranscriptions (seize heures d’entretiens entre 2010 et 2012). On peut donc lire les interventions parlées de tous les Nuclear Device, de leurs compagnes de l’époque, des membres de leurs familles et des amis proches (Loïc qui les accompagnait en tournée, Étienne Sauvage).
Interviennent aussi : Marsu (du label Bondage, manager de Bérurier Noir), leur réalisateur discographique Jean-Yves Prieur alias Kid Bravo (futur Kid Loco), Dom (du service d’ordre de Bérurier Noir), etc.
Paris-Clavel retranscrit telles quelles, sans enjoliver ni dénaturer, les phrases prononcées par tous les interviewés. Cela donne un côté archi-vivant, naturel. Comme si tout ce qui est décrit par les protagonistes était vécu au moment où ils en parlent.
Du début à la fin, pas de langue de bois dans cet ouvrage. Les membres du groupe ne se font pas de cadeaux vis-à-vis d’eux-mêmes et de leurs chansons. Ils autodénigrent presque trop leurs disques, notamment Pascal, trouvant ceux-ci trop froids, mal produits, etc. Marsu pense de même, avec des arguments différents.
Avis (contraire) en tant qu’auditeur de ces chansons depuis 1990 [2] et trop jeune pour avoir pu voir le groupe sur scène : ces versions studio sont excellentes. Elles sont dotées d’un super son, avec une production système D excitante.
« Pretoria », « Servitude nationale », « Deprisa » (vivre vite), « Lettres de fusillés », « Je suis un évadé », « Ouvéa », « Quartiers noirs », « N° 5446 », « Frontière », « El Gran Corrido », leur reprise du « Chant des Partisans » : leurs chansons parlent directement au cœur et font battre ce dernier.
Ces morceaux vibrent. Il y a de la vie, de l’émotion, une saine énergie communicative. Là-dessus, Kid Bravo (qui ne fait pas partie du groupe) y ajoute de chouettes effets sonores bricolos dub. Ils diversifient l’univers sonore de ND.
À l’inverse, tout en faisant abstraction de la captation sur musicassette (donc avec un son moyen), les versions live figurant sur le CD joint au livre sonnent mal fichues. On y entend un bordel monstre, rien n’est en place. Elles n’ont pas la densité et l’impact des versions studio.
Venant de province, les Nuclear Device n’ont pas les atouts, connexions et avantages des musiciens de Paris. En tout cas au départ, avant qu’ils ne rencontrent l’équipe Rock Radical Records et Bondage.
Au fil des pages, on suit leur parcours. Après les premières répétitions et concerts, ils « montent » à Paris. Ils y découvrent les squats, inexistants au Mans, toute une faune bigarrée.
Puis ce sont les tournées, les galères, les parties de rigolades. Les moments héroïques (entre autres, concerts à l’Elysée Montmartre et au New Morning). Les enregistrements de leurs albums Tonnerre à la Une ! (1986) et Western Electric (1987).
Le doute qui s’installe lorsque Patrick décide de quitter le groupe en 1988, remplacé par leur copain d’enfance Chema. L’arrivée de La Mano Negra, autre groupe latino rock : son succès massif et soudain, ses concerts électrochoc. ND se remet alors en question, s’interroge sur ses propres capacités et limites artistiques.
L’ultime disque, Je suis un évadé (maxi 45 tours et CD quatre titres), et la séparation peu après un concert à Rome (Italie) en juillet 1989. Et enfin, ce que chacun a fait jusqu’à aujourd’hui dans sa propre vie.
Les ND vivaient au jour le jour ce qui (avec le recul) est la grande aventure artistique et humaine de leurs vies. Avec intensité, hargne, sincérité, fougue et l’habituel manque de moyens.
La lecture de ce livre le confirme : les membres de ND (et leurs proches) sont liés à tout jamais par une amitié indéfectible. Celle-ci a été consolidée par tout ce qu’ils ont découvert et connu dans le milieu de la musique entre 1982 et 1989.
Même les personnes qui ne connaîtraient pas grand-chose au rock (ou à la musique, tout simplement) seront intéressées par la lecture de ce bouquin. Il s’agit avant tout d’un palpitant récit de vie, avec le rock comme moteur de vie.
45 révolutions par minute – Histoire d’un groupe rock alternatif est un témoignage capital, fondateur et universel. L’histoire que continuent de vivre des dizaines de milliers de groupes en France et ailleurs. De façon différente, avec aussi une technologie qui n’existait pas dans les années 1980. Mais une histoire similaire, d’une génération à l’autre.

François Guibert

[1C’est aussi le cas pour Babylon Fighters. Fusion électrochoc reggae rock rap implacable et cuivrée, à l’époque de leur album apogée Shut Up, Don’t Shutdown (1991). Sur scène : aussi fracassant et inoubliable que Mano Negra.
Le second 33 tours de Camera Silens, Rien qu’en traînant (1987, réédité en CD en 2003), est du rude rock reggae subtil en français. Avec saxophone (élément ici très important). Entre Basement Five, La Souris déglinguée et… Nuclear Device.
Le maxi 45 tours Adonde Van / Barcelona de Corazon Rebelde (sorti en 1983) est mauvais, sans pêche, mixé avec les pieds. Le groupe ne joue pas de manière soudée. En revanche, le 33 tours (sorti en 1985) de cette formation menée par Cacho Vasquez est un superbe exemple de compositions latino rock. Il est clair que Manu Chao pillera sans vergogne ce disque (la chanson « Radio Bemba », au hasard) pour créer le concept Mano Negra en 1987. Comme il s’est fortement inspiré de Chihuahua, le groupe de Napo Romero.
Il faut aussi saluer Human Spirit (« No Pasaran »). Une puissante formation funk’n’roll à tendance afro world reggae beat (1987/1998). Elle est à l’origine de la mouvance funk hexagonale (Malka Family, FFF et leurs descendants).

[2Premier titre entendu, « Arriba España abajo la dictadura » sur Ado FM en 1990.

Fascisme et grand capital, dans Le Combat syndicaliste

jeudi 12 novembre 2015 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Dans Le Combat syndicaliste, n° 405, octobre 2015.

Capital brun

C’est la sixième publication depuis 1936, par cinq éditeurs différents. Comme quoi Fascisme et grand capital, de Daniel Guérin serait comme un « classique ». Et évidemment, on ne peut s’empêcher de le lire ou le relire tant comme élément d’histoire et d’analyse, que comme contribution à la compréhension du présent. Les fascismes italien et allemand ont mobilisé la paysannerie déclassée, les petits boutiquiers puis détourné le lumpen-prolétariat, petites frappes, enragés, laissés pour compte, de toute aspiration révolutionnaire autre que le fascisme. Si on veut considérer le fascisme comme une révolution. Quand il écrit ce livre, nourri de témoignages de militants antifascistes, Guérin assiste à la montée inéluctable des deux fascismes européens, version mussolinienne et hitlérienne. Il remarque que les prétendus « socialistes », assortis de l’adjectif national, ont mis au pas quelques bourgeois récalcitrants, mais sans jamais s’attaquer bille en tête à la propriété capitaliste, malgré des discours en apparence opposés au capital. Niant la lutte de classe, ils ont amalgamé la bourgeoisie et la petite-bourgeoisie déclassées à des éléments du peuple. En magnifiant la force brutale, revanche de ces amertumes sociales collectives, ils ont pu constituer des groupes armés et lancer ses nervis contre les organisations ouvrières, coincées dans leurs logiques légalistes. Ces bandes en chemises noires ou brunes n’auraient pas prospéré sans le financement offert par les grands capitalistes italiens et allemands. L’antisémitisme joue aussi le rôle de ciment des déshérités (et on peut penser aux opérations de séduction trouble d’un Soral aujourd’hui qui dans le même registre mixe un anticapitalisme primaire avec un antisémitisme viscéral). Guérin explique comment les nazis parvinrent à « transmuer l’anticapitalisme de leurs troupes en antisémitisme ».
« L’antifascisme est illusoire et fragile, qui se borne à la défensive et ne vise pas à abattre le capitalisme lui-même », écrit Guérin en dénonçant l’antifascisme de façade, et la vacuité du slogan « Plus jamais ça » qui oublierait l’essentiel, l’oppression capitaliste.

Nicolas, Interpro Nantes

Services publics à crédit, sur le site Mobilis-Pay de la loire

jeudi 12 novembre 2015 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Sur le site Mobilis-Pays de la Loire.

Pas d’arnaque sur la marchandise : à maison d’édition engagée (sur leur blog, cette phrase de Brecht : « Celui qui combat peut perdre. Celui qui ne combat pas a déjà perdu »), auteur engagé. Le lecteur n’est pas pris en traitre, car d’entrée de jeu, Nicolas de La Casinière annonce la couleur au cas où le ton donné par le titre de l’ouvrage et le nom de la collection n’y auraient pas suffit. Il expose en avant-propos son questionnement, qui a débuté avec l’écriture des Prédateurs du béton, enquête sur la multinationale Vinci, en 2013. Une première recherche qui en amènera une seconde.
Nous lisons ainsi une enquête à charge, certes née de questionnements militants, mais menée par un journaliste sérieux et nourrie de faits, de données, et qui cite ses sources. Pour qui ne connaît pas Nicolas de La Casinière, c’est un Nantais prolixe et multicasquettes, auteur de livres, illustrateur, plasticien, enseignant – et journaliste. Il travaille pour la presse nationale mais aussi pour La Lettre à Lulu. Ici, il revêt son costume de redresseur de torts – mais il le fait avec honnêteté. Foncer dans le tas ? Oui, mais en expliquant pourquoi.
Quel est le propos de ce court opus de 122 pages ? Comprendre ce que sont les « partenariats public-privé » et leurs effets sur les finances des collectivités qui y ont recours. Quelles sont les raisons qui motivent la passation de tels accords, quels en sont les acteurs ? Flashback historique, traversée de la Manche, nombreux exemples, la démarche critique est argumentée, mais au service d’une dénonciation sévère.
On nous ment ! C’est l’arnaque ! Le parti-pris de subjectivité de l’auteur ne se masque pas et prend la forme de commentaires par une voix rôdée à piger pour Le Canard enchaîné.
Cela donne un dézingage assumé sur fond d’analyse précise. La lecture en est claire, rapide. On se laisserait facilement aller à penser que l’exercice ne peut pas faire de mal – lire pour s’informer sans être obligé d’adhérer ; car à l’évidence le lecteur saura faire le tri.

Élisabeth Sourdillat

Ma Guerre d’Espagne à moi, dans La Révolution prolétarienne

jeudi 12 novembre 2015 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Dans La Révolution prolétarienne, n° 790, septembre 2015

« Tu pourrais d’abord dire qu’il commandait sur le front de Madrid » assure Mika Etchebéhère face à la caméra. « Il », c’est Hippolyte, son mari et son compagnon depuis leur jeunesse en Argentine. Puis on les suit de Buenos Aires à la Patagonie, de Berlin à Paris et Madrid, tandis qu’une voix off lit des extraits du livre et que sont insérés des entretiens filmés avec elle et de nombreuses archives cinématographiques.

Anarchistes passés au PC, puis communistes d’opposition, Hippolyte et Mika viennent en Europe à la fin des années 1920. Destination : l’Allemagne où ils assistent, impuissants, aux derniers jours de la république de Weimar et à la victoire du nazisme. Retour à Paris où ils militent avec le groupe « Que faire ? ». Puis, c’est le départ pour l’Espagne avec le sentiment de se trouver là où la révolution se produit enfin. Après la mort d’Hippolyte en août 1936 à la tête d’une colonne du POUM, Mika reste au front car, dit-elle, « j’appartiens à cette guerre et je ne peux la servir qu’ici ». Elle participe aux combats et devient capitaine, puis se consacre à l’alphabétisation des miliciens dans un hôpital de Madrid, et, enfin, parvient à passer la frontière à Irún après la victoire franquiste.

Parmi les « ruines de notre époque », le témoignage de Mika, « beau, nécessaire et efficace », laisse voir non seulement « une femme comme il en existe peu », mais aussi ranime « l’invincible espoir qui est le nôtre » (Julio Cortázar).

L.S.