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Eugène Varlin ouvrier relieur sur le site Ma petite bibliothèque rouge

mercredi 29 mai 2019 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Publié le 27 mai 2019 sur le site Ma petite bibliothèque rouge.

Les écrits d’Eugène Varlin

Varlin, membre de l’Internationale ; Varlin, martyr de la Commune. On croise souvent son nom mais sans jamais vraiment le connaître. Et pour cause, il n’a pas laissé d’écrit, si ce n’est quelques articles de journaux, lettres ou placards de la Commune. Michèle Audin s’est donc attachée à rassembler ces différentes sources pour nous fournir un portrait précis du personnage, dans Eugène Varlin, ouvrier relieur 1839-1871, publié aux éditions Libertalia en mars 2019.

« On a bien fusillé Varlin, Flourens, Duval, Millière, Ferré, Rigault, Tony Moilin, gavé le cimetière. »

Les paroles de la chanson Elle n’est pas morte ! résonnent souvent quand on entend le nom d’Eugène Varlin.
Le jeune homme, né en Seine-et-Marne, a commencé à travailler comme ouvrier relieur à Paris. Il s’est alors impliqué dans une société de secours mutuel avant de s’engager pleinement dans l’Association internationale des travailleurs. Il soutenait ainsi les différentes grèves qui fleurissaient à la fin du Second Empire.
Il participa à la garde nationale, au moment du siège de Paris de 1870, en défendant la participation de l’Internationale à son comité central. C’est assez naturellement qu’il s’est engagé pour la Commune, en mars 1871, et en a été élu dans le VIe arrondissement de Paris. Mais, au moment de la Semaine sanglante, il est reconnu par un prêtre et traîné à Montmartre où il meurt fusillé par les balles versaillaises.
Pourtant, ce livre ne cherche pas à représenter le martyr tombant au combat. Il représente bien un Varlin vivant, actif dans ses différents combats, du Syndicat des relieurs à la création de l’Internationale pour finir comme membre de la Commune.
Ce livre n’est pas non plus une biographie du personnage. Il y en a d’autres sur le sujet : celle de Michel Cordillot, qui date de 2016, ou celle, plus récente, que Jacques Rougerie, historien de la Commune, vient de publier aux éditions du Détour.
Pourtant, l’écrivaine (et mathématicienne !) ne s’efface pas complètement derrière ce personnage qu’elle affectionne. Son écriture permet de lier et de contextualiser les différentes archives entre elles.
Car ce n’est pas un texte qui est toujours facile à lire. On navigue entre des correspondances incomplètes, des notes administratives et des comptes rendus de réunions. La parole de l’écrivaine est donc nécessaire pour garder le fil de l’histoire.
Cela permet de mettre en relief les différents combats de l’ouvrier-relieur. Mais le revers de la médaille est que sa personnalité, sa personne privée, s’efface parfois devant le personnage public.
À plusieurs reprises, Michèle Audin regrette que l’on n’ait aucune lettre d’amour dans ce livre. On en vient à regretter la dispersion voire la disparition des archives qui ne nous permettent pas de mieux connaître cet ouvrier dont la vie s’est arrêtée trop tôt.
Il est en effet difficile d’approcher vraiment la personnalité de Varlin à travers ces documents, parfois froids et sans âme. Pourtant, ce livre y arrive par moments, quand il met en lumière les relations qui l’unissait au reste de sa famille par exemple. Mais ces quelques moments restent rares.
On aperçoit surtout ses convictions et ses combats. Et avec eux, on entrevoit les débats qui ont pu animer le syndicat des relieurs, l’Internationale ou encore les élus de la Commune.
C’est donc un genre original que nous livre là Michèle Audin, à mi-chemin entre l’anthologie et la biographie. À défaut de souvenirs écrits de sa main propre, ce livre nous permet d’approcher ce personnage par ses propres mots, ceux d’un ouvrier devenu élu de Paris.
Ce livre est plus une anthologie des textes connus écrits de la main de Varlin. Michèle Audin a fait ici un formidable travail de recherche sur ces différentes sources, un peu à la manière de ce qu’elle fait sur son blog Ma Commune de Paris. Son travail a notamment permis d’identifier de nouvelles photographies du futur communard, au milieu de membres de l’Association internationale des travailleurs.